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18 juillet 2014

17/07/2014

le cavalier sans tête - SAEZ

Papaoutai - Stromae

Jours étranges - SAEZ

sweet sixteen

 

Papa

Je suis définitivement forgée par la mort de papa.

Mais commençons par le début.

Papa a été marrié une première fois, 3 enfants, 1 garçon, 2 filles.

Il rencontre maman, 1 fille.

Je suis ensuite née. Un espèce de liant entre toutes ces pièces qui doivent s'assembler. Petite fille qui aime tout le monde et que tout le monde aime de façon différente mais sincèrement c'est indéniable bien que la suite ait pu faire croire le contraire.

Il était un père moderne avant l'heure. Il a divorcé quand c'était encore une honte. Il a reconnu Soi comme sa fille naturelle.

Il aimait tellement ses 5 enfants, tous ne l'ont pas compris. Il était heureux, vraiment. Il aimait maman tellement, il la respectait. Mes exigences sur le respet viennent de là. Je suis heurtée par non respet, c'est mon point faible.

Il souffrait de deux choses, la première sentimentale : ses 3 premiers enfants ont mal vécu le divorce et lui ont longtemps reproché, à moi aussi d'ailleurs. Il buvait deux verres de wiskey quand il revenait de les avoir redéposer chez leur mère.

La second physique : il avait fait deux crises cardiaques, il savait qu'il mourrait trop tôt, que je ne serai pas assez grande pour en sortir sans trop de dommages. Il m'a préparée, on en a discuté, souvent, à notre manière. J'ai eu 16 ans dans un autre pays auprès de Soi, on m'a chanté sweet sixteen. Deux jours après, un appel, maman nous demande de rentrer en France et de la rejoindre à l'hôpital. Sur le trajet, on apprend qu'il est dans le coma. Ma grande soeur devient ma petite soeur et me demande de la protéger du pire, je ne peux pas, ça je n'ai pas le pouvoir.

A l'hôpital tout le monde est là, ils sont nombreux, ils me regardent et se disent elle n'a que 16 ans. Je vais le voir, beaucoup de machines, une couverture chauffante qui n'arrive pas tout à fait à le réchauffer. Ses paupières sont maintenus fermées par des bandes collantes. Je me dis que mon papa a une cage thoracique faite pour me protéger, j'aimerais m'y blottir. Maman lui dit "c'est notre anniversaire de mariage, tu ne vas pas laisser Chirac gagner les élections hein ?". Ca me fait sourire. Je le touche, c'est bien sa peau mais plus froide et l'odeur est différente, une odeur d'hôpital. Je repars dans la salle d'attente. Ils me regardent, me parlent, me touchent. Je ne veux pas, je ne suis plus là, la folie arrive. Je me recroqueville sous une table (je ferais ça souvent les semaines suivantes). Mes ongles rencontrent la peau de ma gorge, un long cri s'échappe puis un autre et encore et encore. Le sang coule, la peau de ma gorge se détache sous mes ongles. J'ai besoin de ça pour concurrencer la douleur qui va bientôt apparaitre, il va mourir je le sais, je le sais déjà.

Les médecins disent rentrez à l'hôtel, si son état ne s'agrave pas d'ici demain matin, il survivra. Mes yeux, mes oreilles ne fonctionnent plus, je suis en mode automatique. Je vois maman sur le lit à côté, elle est terrassée. Je relève la tête et essaye d'être une béquille pour elle. Je ferai ça longtemps très longtemps, des années, encore parfois maintenant mais de façon plus subtile. La nuit passe. Un espoir anéanti par l'appel des médecins au petit matin, il faut venir c'est la fin. Seule avec lui je lui raconte l'histoire d'un orque et d'un aigle qui arrive malgré tout à se rejoindre. Ils le débranchent, depuis la salle d'attente j'entends maman s'effondrée sur son homme. C'est fini. Mon frêre, mes soeur et moi allons nous allonger au soleil sur la pelouse. C'est un beau jour pour mourir.

Je ne pleure que seule et recroquevillée sous le bureau de ma chambre. J'apprendrai plus tard que des réunions de famille auraient lieu à mon sujet. Elle ne pleure pas. Elle est trop droite dans ses bottes. Elle n'a que 16 ans.

Pendant des années j'ai été dure comme du granit. Peu de sentiments, aucune peur, droite dans mes bottes. Une grande partie de moi est toujours comme ça. Je m'attache plus facilement maintenant mais je suis capable de me détacher de quelqu'un sans crier gare. Il suffit d'arriver au bout de ce que je peux donner.

Après sa mort. Cancer. Maman en chimio. Je cours entre les bancs du lycée et les hôpitaux. Je la ramasse par terre. Je l'entends parler de suicide si je n'étais pas là. Elle n'a que 16 ans. Elle n'a que 17 ans. Elle n'a que 18 ans. On rit quand je lui rase la tête, on rit encore plus quand Soi le découvre et qu'ell hurle au scandale. Le perruquier est un moment inoubliable tellement nous avons ri toutes les trois. Je me souviens aussi de Soi et moi allongées sur le sol du salon à pleurer en écoutant de la musique. Je me souviens être seule à la maison, maman à l'hôpital. Les gends qui viennent et repartent pour ne pas me laisser seule. Je préférait être seule mais ça ne se dit pas. Résultat du BAC, rattrapage. Je hurle contre mon père. J'ai fait S, je devais l'avoir à mes côtés pour réussir. Je l'ai finalement.

Je grandi, je déménage, je laisse maman seule. Je trouve Bu, je le vois je le veux. C'est mon homme. Un an après Ly est là, j'ai 22 ans. Bu et Ly ont largement entamé le granit. Ca m'inquiète parfois.

 

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